Avant-propos : Atlas du Plastique

Atlas du Plastique

Nous vivons à une époque où nous touchons plus souvent du plastique que nous ne touchons ceux que nous aimons. Le plastique est partout : dans l’air, dans l’eau et dans le sol. Il a été, et reste un moteur puissant de la mondialisation. Et même pour les citoyens sensibilisés, le plastique est pour ainsi dire incontournable, et réussir à s’en passer est un défi.

La fabrication de plastique nuit au climat

Nous commençons tout juste à appréhender les effets de notre dépendance mondiale à l’égard de ce matériau. Ce qui le rend utile est précisément ce qui en fait un produit nocif : constitué de chaînes moléculaires trop résilientes pour se biodégrader, il dure longtemps. Sa dégradation a en outre des effets néfastes sur la nature et sur les êtres humains. Où qu’ils aillent, les scientifiques qui cherchent du plastique en trouvent, y compris aux confins de la planète. Et non content d’être omniprésent dans notre environnement, il l’est aussi dans nos corps.

L’espèce humaine est contaminée par le plastique, et pas uniquement via les poissons qui en ont ingéré et que nous mangeons. Le plastique pollue à tous les stades de son cycle de vie, depuis l’extraction du pétrole et du gaz nécessaires à sa production jusqu’au moment où il est jeté n’importe où, mis en décharge ou brûlé.

La consommation et la production de plastiques connaissent une accélération sans précédent : plus de la moitié de toutes les matières plastiques ont été fabriquées depuis 2005. Le marché est entre les mains d’une poignée de multinationales qui tirent notamment profit du gaz de schiste américain : elles projettent en effet de construire plus de 300 unités de production et d’en agrandir dans l’espoir de commercialiser 40 % de matières plastiques en plus d’ici 2025.

Toutefois, les entreprises productrices de plastiques et de substances pétrochimiques sont de plus en plus sous la pression des mouvements d’opposition qui gagnent en importance. Mais si elles commencent tout juste à reconnaître leurs responsabilités en matière de pollution, elles continuent toutefois à rejeter leur responsabilité sur les consommateurs.

Et pourtant : dans les nouvelles zones géographiques où elles investissent massivement – Asie, Afrique, Amérique du Sud – les infrastructures de gestion et de recyclage des déchets sont très en retard par rapport à celles des pays de l’hémisphère nord. Face à cette réalité, un mouvement baptisé « Break Free From Plastic », fort de 1800 entités de la société civile, travaille partout dans le monde à porter un coup d’arrêt définitif à la pollution due au plastique. Car les solutions existent, et elles essaiment, partout à travers le monde.

La France a encore beaucoup à faire. Si elle a récemment adopté une nouvelle loi sur l’économie circulaire, elle doit, main dans la main avec l’Allemagne, et avec les autres pays européens, être à la hauteur de ses responsabilités dans la crise du plastique et montrer la voie vers un monde où le plastique n’est plus automatique.

L’Atlas du plastique est le fruit d’une coopération entre la Fondation Heinrich Böll et le mouvement Break Free from Plastic. Vous y trouverez les faits tangibles, les données et les chiffres qui montrent l’ampleur de la crise du plastique et la nécessité d’y répondre rapidement et à tous les niveaux. Avec cette édition francophone, réalisée par le bureau de Paris de la Fondation Heinrich Böll, en coopération avec La Fabrique Écologique et avec les bureaux de Dakar, Rabat et Tunis, nous entendons rendre compréhensible au public francophone une question majeure – qu’il s’agisse de l’Europe, fortement consommatrice de matière plastique, ou de l’Afrique, continent pionnier des interdictions de sacs plastiques, mais également nouveau terrain de jeu des multinationales du plastique - comment résoudre la crise du plastique ?

Dans la présente déclinaison française de l’Atlas, nous montrons que la France a encore beaucoup à faire. Si elle a récemment adopté une nouvelle loi sur l’économie circulaire, elle doit, main dans la main avec l’Allemagne, et avec les autres pays européens, être à la hauteur de ses responsabilités dans la crise du plastique et montrer la voie vers un monde où le plastique n’est plus automatique.

Ensemble, à l’échelle locale, nationale et globale, nous devons nous engager pour une baisse rapide et drastique de la production et de la consommation de plastique, et pour faire adopter des législations s’attaquant aux racines mêmes de cette pollution. Face à la crise que nous traversons, les solutions existent : il faut réduire drastiquement la commercialisation des matières plastiques, instaurer et soutenir des communautés et des villes zéro déchet et introduire des modes de livraison durables et des produits réutilisables. Les pouvoirs publics doivent également tenir pour responsables les sociétés qui contribuent à l’heure actuelle à la crise du plastique et en tirent profit. Et les citoyens doivent exiger des actes et des solutions tangibles de la part de leurs décideurs afin que nos écosystèmes et nos corps soient libérés du plastique et de ses additifs toxiques.

 

  • Barbara Unmüßig, Présidente de la Fondation Heinrich Böll
  • Jens Althoff, Directeur du bureau de Paris de la Fondation Heinrich Böll
  • Lucile Schmid, Vice-Présidente de La Fabrique Écologique
  • Stiv Wilson, Producteur exécutif de The Story of Plastic
  • Delphine Lévi-Alvarez, Coordinatrice européenne du mouvement Break Free From Plastic