La Grèce, grand soleil, ciel voilé

Atlas de l'énergie

Soleil abondant, mer et montagnes venteuses : la Grèce dispose de sérieux atouts en énergies renouvelables. Les problèmes d’endettement du pays bloquent néanmoins les potentiels progrès en vue d’un avenir moins pollué.

Flux énergétiques en Grèce
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Flux énergétiques en Grèce

Avec 50 % d’exposition au soleil par mètre carré de plus que l’Allemagne, la Grèce dispose du plus fort potentiel d’énergie renouvelable en Europe. Ce potentiel n’est que très faiblement exploité. Overcast Germany a installé en Allemagne plus du double de la capacité solaire photovoltaïque (499 watts par personne) que la Grèce (240 watts). Le potentiel éolien hellène est également largement sous-utilisé. Les îles du sud de la mer Égée (à l’exception de la Crète) en sont un parfait exemple : jusqu’à 6 000 mégawatts (MW) d’énergie éolienne pourraient y être produits, plus de 70 fois la capacité actuelle, et ce même en prenant en considération les contraintes géographiques et la protection des sites archéologiques. L’installation, l’exploitation et l’entretien des turbines pourraient à eux-seuls créer plus de 1 100 emplois.

La toute première éolienne européenne a été installée sur l’île de Kythnos en 1982. Depuis ce premier jalon, les énergies renouvelables se sont fortement développées, notamment grâce aux tarifs de rachat et à la priorité des énergies renouvelables sur le réseau. Entre 2007 et 2016 la capacité éolienne a plus que doublé, passant de 846 MW à 2 374 MW. La capacité photovoltaïque est quant à elle passée de 9 MW en 2007 à 2 611 MW en 2016 !

Le développement des renouvelables et la baisse de la demande consécutive à la crise économique ont provoqué l’augmentation de la part des énergies renouvelables dans le mix électrique. 2016 fut une année historique : les énergies renouvelables, dont celles produites par les centrales hydroélectriques, ont fourni 30 % de l’électricité de Grèce continentale, dépassant pour la première fois le lignite, ce dernier chutant à un niveau record de 29 %.

Il y a deux facteurs pour expliquer cette forte croissance. En premier lieu, la directive de la Commission européenne sur l’énergie de 2009, qui a engendré la ratification d’une loi ambitieuse visant à promouvoir les sources renouvelables. En second lieu la baisse des coûts d’installation des énergies renouvelables : entre 2007 et 2014 le prix des modules photovoltaïques a baissé de 79 % tandis que celui des éoliennes chutait de 25 %. Ces deux points ont contribué à franchir d’autres obstacles persistants : absence de réelle coordination entre les autorités, retards dans la délivrance de permis, s droits de propriétés incertains et défauts dans l’aménagement du territoire.

Mais la crise financière de 2014 a mis le frein sur la croissance des énergies renouvelables. Un fonds spécial destiné à la rétribution des producteurs d’énergies renouvelables a plongé dans le rouge. Dans le cadre de l’accord sur l’allégement de la dette, le gouvernement s’est engagé à revenir dans le vert. Les tarifs photovoltaïques ont ainsi été réduits, avec effet rétroactif, entrainant un logique remboursement. Mais les coupes budgétaires censées renflouer les caisses ont également touché les secteurs de l’éolien et de l’hydroélectricité, qui n’étaient pourtant pas responsables de ce déficit. Les réductions ne concernent par ailleurs que les producteurs d’énergies renouvelables, alors que les combustibles fossiles sont parmi les principaux responsables de l’importance du déficit.

Le contrôle des capitaux imposé en 2015 a également aggravé les problèmes auxquels le système bancaire grec est confronté depuis 2010. Le coût du capital est aujourd’hui de 12,6 %, soit sept fois plus qu’en Allemagne, rendant les investissements dans les énergies renouvelables en Grèce particulièrement risqués. L’objectif d’une proportion de 40 % de la consommation d’électricité renouvelable d’ici 2020 semble actuellement totalement hors de portée.

Un projet de loi destiné aux « collectivités énergétiques », dont l’adoption est prévue en 2018, devrait reconnaitre les droits des citoyens à produire, stocker, vendre et consommer leur propre énergie. Des réponses technologiques existent déjà pour les îles dépendant actuellement de générateurs. L’île de Tilos, près de Rhodes, a par exemple installé des éoliennes, des panneaux solaires, des batteries, ainsi qu’un système intelligent capable de gérer le micro-réseau énergétique local.

Grèce - une lente croissance

Le ciel semble cependant s’assombrir. La société étatique Public Power Corporation, par exemple, construit actuellement une nouvelle usine de lignite de 660 MW et prévoit la construction d’une autre de 450 MW, et ce malgré la baisse de l’économie du lignite. Tout autant Public Power Corporation que le gouvernement semblent déterminés à maintenir l’énergie produite par le pétrole dans les îles non encore raccordées au réseau. Le gouvernement soutient également la construction du gazoduc EastMed dédié au transfert de gaz en provenance d’Israël et de Chypre vers l’Italie, via la Grèce.

Un changement politique pourrait éclaircir l’horizon. Le marché de l’énergie pourrait être pleinement intégré et la collaboration avec les pays balkaniques voisins pourrait être intensifiée. Les fonds du système d’échange de quotas d’émission de l’Union européenne pourraient accélérer les connexions entre les îles et les énergies renouvelables pourraient être développées dans les îles non reliées. De telles initiatives simples pourraient contribuer à faire de la Grèce une place incontournable des énergies vertes.