Contrairement à la France, en Allemagne c'est le chancelier qui gouverne le pays, et non le président de la République. Comment expliquer cela ? Le chancelier peut-il être renversé par le Parlement ? Comment exerce-t-il ses pouvoirs ? Decryptage.
S’il existe bien un président de la République allemande, la personnalité politique la plus puissante d’Allemagne est en réalité le chancelier ou la chancelière (Bundeskanzler ou Bundeskanzlerin). Selon la loi fondamentale de 1949, son rôle est de « fixer les grandes orientations de la politique et d’en assumer la responsabilité ». Il ou elle dirige l’action du gouvernement et est au cœur du pouvoir exécutif. En tant que chef de la diplomatie, c’est également le chancelier qui représente l’Allemagne à l’étranger.
Mais comment est-il/elle élu.e ? Le chancelier ou la chancelière n’est pas élu.e au suffrage universel direct comme en France, mais par le Bundestag, à la majorité de ses membres et par un scrutin secret, sur proposition préalable du président fédéral. Il est élu tous les quatre ans, en même temps que le Bundestag. Dans la pratique, le chancelier élu est le candidat ou la candidate de tête du parti majoritaire (ou le premier parti majoritaire au sein de la coalition) lors des élections fédérales. Ce mode de scrutin vise à garantir la stabilité et l’efficacité de son mandat : ne peut ainsi être élu que le candidat qui est assuré de rassembler la majorité absolue des voix au Parlement.
Après l’élection, le nouveau chancelier ou la nouvelle chancelière est nommé.e par le président fédéral, et prête serment devant le Bundestag. Il peut choisir ses ministres et fixer leurs domaines de compétences. Il ne peut être destitué que par une « motion de défense constructive » votée par le Bundestag : le Parlement doit alors élire un successeur à la majorité de ses membres. En Allemagne, il n’y a pas de limite de mandat pour le chancelier, ce qui suscite des débats au sein de la sphère politique. Helmut Kohl, tout comme Angela Merkel, sont ainsi restés 16 ans au pouvoir.
Le rôle central accordé au chancelier se justifie par des raisons historiques : il s’agissait, après la seconde guerre mondiale, d’éviter de concentrer trop de pouvoir dans les mains d’une seule personne et de privilégier un régime parlementaire fort et stable. L’étendue des pouvoirs du chancelier, à côté d’un président qui occupe essentiellement une fonction symbolique, a par ailleurs conduit Konrad Adenauer à parler d’une « démocratie du chancelier » (Kanzlerdemokratie) pour évoquer le système institutionnel allemand.