L’emprise de la Chine sur la AIIB

Communiqué

Banque asiatique d’investissement dans les infrastructures : une perte croissante de la transparence et du contrôle par les partenaires internationaux.

Coffre fort de banque

En amont du congrès annuel de la Banque asiatique d’investissement dans les infrastructures – Asian Infrastructure Investment Bank (AIIB) –, qui se tiendra du 26 au 28 octobre, la fondation Heinrich-Böll a présenté une analyse des exigences de transparence auxquelles répond la AIIB après examen de leurs cadres sociaux et environnementaux pour les financements. La Chine contrôle la banque alors que des pays européens comme l’Allemagne et la France n’en sont qu’actionnaires. Ils ont toujours justifié leur participation à l’AIIB par leur volonté de renforcer les normes environnementales et sociales et pour plus de transparence.

Les autrices de l’analyse, Dr. Korinna Horta et Wawa Wang Wang (Just Finance International, VedvarendeEnergi) concluent que Pékin a concentré le pouvoir décisionnel sur les financements de projet de la banque aux mains du président chinois de l’AIIB et que les états internationaux cofondateurs, pour une question d’efficacité, n’ont plus qu’une faible part dans le processus d’approbation des projets.

La banque finance surtout des projets d’infrastructures de grande envergure à risque tels que des centrales électriques, des barrages ou des infrastructures de transport ayant un impact social et écologique potentiellement négatifs. Dans le même temps, l’analyse indique clairement que la séparation de la AIIB et de la Belt and Road Initiative (BRI) chinoise instaurée il y a quelque temps, a finalement été annulée. La AIIB doit désormais, à la demande de Pékin, récupérer la gestion d’un programme financier de la BRI, sans toutefois que ces activités ne soient soumises à la commission de surveillance internationale.

Plus particulièrement, le nouveau cadre social et environnemental de l’AIIB entré en vigueur ce mois-ci annonce certes des délais pour la publication des évaluations de l’impact environnemental des projets à haut risque, mais – d’après l’analyse du Dr. Horta et Wawa Wang – il ouvre en même temps la possibilité aux plus hauts décisionnaires et clients de les contourner.  De cette manière, des projets avec de lourdes conséquences sociales et écologiques pourraient voir le jour en dernière instance sans que ce ne soit rendu public.

Barbara Unmüßig, co-présidente de la fondation Heinrich Böll, a déclaré à l’occasion de cette publication : « Au vu de ses capacités d’investissement, la AIIB occupe une position clé si l’on veut réussir la décarbonisation de l’économie mondiale. C’est pourquoi de jolis mots sur le papier ne suffisent pas. Il faut une totale transparence grâce à des obligations claires d’information et à des normes sociales et écologiques concrètes. Elles doivent valoir sans exception et être vérifiables à tout moment. Elles ne doivent pas pouvoir être ébranlées par des moyens détournés au gré de caprices politiques et selon les intérêts stratégiques nationaux. »

Unmüßig poursuit : « Les membres fondateurs européens de l’AIIB doivent mettre le congrès annuel de l’AIIB (26-28.10.2021) et l’évaluation prévue de la stratégie énergétique à profit pour sortir du financement d’infrastructures fossiles et exiger une transparence totale et des normes sociales et environnementales élevées obligatoires. Avec une banque si puissante dont ils sont actionnaires, il en résulterait une protection sérieuse du climat et une responsabilité sociale. L’Union européenne et avant tout la France et le gouvernement allemand (encore en exercice) ont justifié leur adhésion à la Banque par leur volonté d’imposer des normes plus importantes sur l’octroi de crédits. Il leur faut maintenant le prouver. »

L’analyse du Dr. Horta et de Wawa Wang est téléchargeable (en version anglaise) ici. Une version française sera prochainement disponible.