Communiqué de presse : publication de l'Atlas des Pesticides

Atlas des Pesticides

Paris, le 16 mai 2023. Le bureau de Paris de la Fondation Heinrich Böll et La Fabrique Écologique publient L’Atlas des Pesticides*, en coopération avec le collectif Nourrir et Générations Futures.

Temps de lecture: 8 minutes
Atlas des Pesticides - couverture

Cet Atlas montre tout d’abord que nous ne sommes pas sur la bonne voie : la quantité de pesticides utilisés dans le monde a augmenté de 80 % depuis 1990, causant des dommages à la santé des agriculteurs, des consommateurs et à la biodiversité.

Le marché mondial des pesticides a presque doublé au cours des 20 dernières années et atteint 53 milliards d’euros de chiffres d’affaires en 2020. Le marché est dominé par une poignée d’entreprises. Les quatre principales (Syngenta Group, Bayer, Corteva et BASF) contrôlent environ 70 % du marché mondial des pesticides.

L’Atlas souligne que l’utilisation des pesticides présente des dangers pour la santé humaine, et en premier lieu, celle des agriculteurs. On dénombre 385 millions d’empoisonnements aux pesticides par an dans le monde, très majoritairement dans les pays du Sud.

L’utilisation des pesticides est fatale pour la biodiversité : les champs en agriculture biologique comptent cinq fois plus d’espèces de végétaux et environ 20 fois plus d’espèces d’insectes pollinisateurs.

Les ingrédients actifs des pesticides peuvent s’infiltrer dans le sol et contaminer les eaux souterraines, être transportés par l’air ou s’envoler – certains peuvent être trouvés à plus de 1 000 kilomètres du lieu où ils ont été utilisés.

Une analyse coûts-bénéfices, présentée dans cet Atlas, montre que les pesticides coûtent en France presque deux fois plus à la société que ce qu’ils rapportent. Au niveau européen, le coût est 2,5 fois supérieur aux bénéfices du secteur. De plus, sur les terres surexploitées avec le système agricole intensif incluant les pesticides, les rendements plafonnent aujourd’hui voire sont en baisse dans certaines régions.

Aujourd’hui,  une très large majorité de Français et d’Allemands sont en faveur de l’interdiction de l’utilisation de pesticides dans l’UE : 88 % des Français et 82 % des Allemands, d’après un sondage IPSOS pour la Fondation Heinrich Böll. Et ils ne veulent pas que l’on laisse les agriculteurs seuls face à cette transformation nécessaire : 86 % des Français et 83 % des Allemands demandent un meilleur accompagnement des agriculteurs au sein de l’Union européenne pour réduire l’utilisation de pesticides.

Au-delà du constat, cet Atlas montre aussi que les solutions existent, avec de nombreux exemples sur le terrain d’alternatives à l’utilisation de pesticides. Les solutions au niveau de la production agricole passent par une approche systémique, et un changement global de système de production combinant diverses pratiques, telles que la diversification culturale, les rotations longues, les cultures associées, la lutte biologique contre les ravageurs, les couverts végétaux ou l’agroforesterie. Et toute la filière est concernée, des agriculteurs aux transformateurs et distributeurs, jusqu’aux collectivités territoriales et aux citoyens.

Citations :

 « Nous voulons avec cet Atlas alerter sur l’omniprésence des pesticides dans notre environnement, et leurs impacts sur la santé et la biodiversité, et pointer les responsabilités des industriels et les manquements des politiques publiques, mais aussi donner de l’espoir en montrant les alternatives qui essaiment sur le territoire, et qui permettent de se passer des pesticides » déclare Jules Hebert du bureau de Paris de la Fondation Heinrich Böll, qui a coordonné la version française de cet Atlas avec Mathilde Boitias.

Marc Berthold, directeur du bureau de Paris de la Fondation Heinrich Böll souligne qu’« au-delà des tensions parfois exacerbées entre agriculteurs et militants, activistes et écologistes, il y a une voie souhaitée par les citoyens de nos deux pays : celles de politiques publiques plus ambitieuses permettant de soutenir et d’accompagner les agriculteurs pour leur permettre de réduire et d’arrêter leur utilisation de pesticides ».

Pour Géraud Guibert, président de La Fabrique Écologique, « L’atlas fait ressortir que la France, si elle a des ambitions louables en matière de réduction des pesticides, est loin d’avoir atteint les objectifs affichés, malgré des initiatives pertinentes, mais qui restent insuffisantes. Il est temps que des changements structurels soient véritablement entrepris pour réaliser la transition agricole et alimentaire plus que jamais nécessaire ».

« Cet atlas met le doigt sur la nécessité d’une approche globale pour se passer des pesticides, car cela nécessite un changement de système de production, et nous oblige à repenser tout notre système agricole et alimentaire, en impliquant tous les acteurs concernés » précise Mathilde Boitias, directrice de La Fabrique Écologique et qui a coordonné la version française de cet Atlas.

« Les faits sont têtus : l’utilisation des pesticides de synthèse, si elle profite à quelques-uns, a surtout des effets néfastes sur la santé des personnes exposées et des écosystèmes. Pollutions des milieux, perte en biodiversité, augmentation des risques de développer des maladies chroniques… A contrario, les systèmes agricoles non dépendants à ces intrants chimiques dangereux voient leurs milieux reprendre vie, la diversité biologique augmenter, la qualité des eaux s’améliorer. Cet Atlas permet de rendre ce constat tangible et doit inciter nos décideurs à prendre les mesures devenues indispensables : alors que les alternatives sont là, il faut mettre un terme à l’usage de ces substances mortifères et au plus tôt ! Nos ONG s’emploient en ce sens et mèneront le combat jusqu’à ce que cela advienne » commente Nadine Lauverjat, déléguée générale de Générations Futures.

« Les pesticides représentent un exemple flagrant d’une éternelle fuite en avant. Or, face au constat sans appel dressé par cet Atlas, il est clair que l’objectif ne doit pas être une optimisation de leur utilisation à grand renfort d’innovations qui ne répondent en rien aux enjeux posés. Le triptyque "robotique, numérique, génétique" soutenu par une partie de la profession agricole perpétue le modèle actuel mortifère pour les paysans en les entraînant vers toujours plus de dépendance à une poignée d’acteurs plus intéressés par leurs profits que par l’avenir de notre planète » alerte Mathieu Courgeau, paysan en Vendée et co-président du Collectif Nourrir.

 

CONTACTS PRESSE :

 

*L’Atlas des Pesticides est une publication de 66 pages qui livre faits et chiffres sur l’omniprésence des pesticides dans notre environnement. L’Atlas des pesticides analyse en 27 chapitres illustrés de cartes et graphiques les impacts de ceux-ci sur la santé et la biodiversité, les responsabilités de l’agro-industrie en la matière, ainsi que les politiques publiques et il met en lumière les alternatives, en lien avec la transformation du modèle agricole et alimentaire.

La version française de cet atlas, publié conjointement par la Fondation Heinrich Böll et la Fabrique Écologique, en coopération avec le Collectif Nourrir, et Générations Futures, membre du Pesticide Action Network Europe – à laquelle ont contribué des auteurs-trices de SOLAGRO, du Collectif Nourrir, de l’Observatoire Terre Monde, du BASIC et de l’INRAE – met en lumière des problématiques particulières : outre une cartographie de l’usage des pesticides, elle fait le point sur les politiques publiques menées – notamment le plan Écophyto – et sur les coûts et bénéfices de ce modèle. Elle aborde la surexposition des Outre-Mer à certains de ces pesticides, et leur place préoccupante dans la viticulture française. Mais elle propose également d’explorer les alternatives qui essaiment sur le territoire.

Le consulter en ligne : https://fr.boell.org/fr/atlas-des-pesticides

La Heinrich-Böll-Stiftung est une des fondations politiques allemandes, proche du parti Alliance 90/ Les Verts (Bündnis 90/Die Grünen). Centre de réflexion autour de la transformation écologique et sociale, de la démocratie, des droits humains, de l’égalité des genres, de la diversité et des droits LGBTQIA+, elle dispose d’un réseau international de 35 bureaux dans le monde et agit pour favoriser les échanges et coopérations sur ces questions, en particulier entre les acteurs de la société civile. Le bureau de Paris travaille sur les questions liées à la transformation écologique et sociale, la revitalisation de la démocratie et enfin l’approfondissement de la politique étrangère et de sécurité commune au niveau européen.  https://fr.boell.org
 
La Fabrique Écologique, fondation pluraliste et transpartisane de l’écologie, est un Think et Do-Tank qui a pour objectif de promouvoir la transition écologique sur la base de propositions pragmatiques, directement applicables et concrètes. Forte de son large réseau d’experts, elle a établi des méthodes de co-construction citoyenne favorisant une approche rigoureuse des sujets traités. Depuis 2013, la diversification de ses formats de diffusion lui a permis de questionner des thématiques aussi diverses que la décentralisation énergétique, l’alimentation et l’agriculture ou encore la mobilité https://www.lafabriqueecologique.fr/