Dans les semaines à venir, ECCO a prévu de publier plusieurs contributions sur des sujets que nous considérons comme essentiels à tout programme de politique climatique. Le défi de la politique climatique est complexe : il ne s'agit pas d'y apporter des réponses binaires, mais d'être capable d'atteindre un consensus autour d'une proposition cohérente et réalisable qui s'attaque aux problèmes actuels, aligné sur les préconisations scientifiques et garantissant un avenir. Voici une première réflexion et un avant-goût des contributions que nous publierons pendant cette période électorale.
Dans les semaines à venir, ECCO a prévu de publier plusieurs contributions sur des sujets que nous considérons comme essentiels à tout programme de politique climatique. Le défi de la politique climatique est complexe : il ne s'agit pas d'y apporter des réponses binaires, mais d'être capable d'atteindre un consensus autour d'une proposition cohérente et réalisable qui s'attaque aux problèmes actuels, en garantissant un avenir aligné sur les préconisations scientifiques. Voici une première réflexion et un avant-goût des contributions que nous publierons pendant cette période électorale.
On constate qu’aujourd’hui, tout le monde a quelque chose à dire sur le changement climatique et, comme nous le savons, tout est permis en politique, des platitudes à l’adoption de l'esthétique des réseaux sociaux. La politique climatique ne peut plus utiliser un langage abstrait mais doit faire référence à des objectifs et à des données concrètes, à commencer par la réduction des émissions de CO2 dans l'atmosphère. On peut par exemple citer les objectifs déjà définis en Europe, comme la réduction des émissions nettes d'au moins 55 % d'ici 2030 par rapport à 1990. Jusqu'à présent, l'Italie ne les a réduites que de 26,7 % [1], mais elle ne dispose pas d'un nouvel objectif national à l'horizon 2030 conforme à l'objectif européen et international de limiter le réchauffement climatique à 1,5 degré. Les derniers gouvernements ont promis de porter la production d'énergies renouvelables dans le secteur de l'électricité à 70-80 % d'ici à 2030, et lors de la réunion ministérielle du G7 en mai dernier, l'Italie s'est engagée à atteindre l’objectif d’un secteur électrique décarboné d'ici à 2035. Mais aujourd'hui, nous sommes bloqués à 35 %.
Dans cette période électorale, la société a une nouvelle exigence envers les partis. Une exigence plus profonde, politique. Et si cette exigence ne concerne pas directement notre capacité à faire un effort pour littéralement sauver collectivement notre peau, elle appelle au minimum une réponse à d'importantes questions sociales et économiques inextricablement liées au climat.
La liste est longue. La crise du prix du gaz et la politique énergétique ; la compétitivité des entreprises et l'emploi ; l'urgence en matière de revenus ; quelle voiture acheter ; la mise en œuvre du plan de relance ; les relations avec l'Europe et la coopération internationale ; la dette publique et le pacte de stabilité ; et enfin, le coût inestimable des impacts climatiques, de la sécheresse à la rupture de la Marmolada.
Plus on accepte qu'il faut réduire les émissions ayant un impact climatique, plus on comprend que les transformations nécessaires pour y parvenir touchent un grand nombre de sphères économiques et sociales dont le lien avec le climat n'est pas toujours aussi évident que pour la canicule estivale ou les arbres dans les parcs. L'éducation, le tourisme, la pêche, l'agriculture, la numérisation et la fiscalité s'ajoutent sans difficulté à cette liste. Et ainsi de suite.
Les signaux d'alarme ne pourraient être plus explicites. Même ceux qui suivent le sujet de loin se rendent compte qu'un plan complet et cohérent est nécessaire à court et à long terme pour permettre la transition des citoyen-ne-s et des entreprises. Une politique faite de slogans et d'actions isolées et incohérentes, ou pire, de greenwashing, risque au contraire de creuser le fossé entre la société civile et l'urgence climatique, aggravant inévitablement l’enchaînement des crises.
Si les sondages montrent que tout le monde est conscient de la gravité et des conséquences du changement climatique, ce qui laisse entrevoir de vastes possibilités de consensus politique pour ceux qui veulent y faire face, les questions contingentes restent prioritaires : les factures élevées passent avant les émissions, l’emploi avant les voitures électriques. Ces priorités prouvent à leur tour avec force la transversalité des questions climatiques : il ne peut y avoir de solution à la hausse du prix de l’énergie sans réduction de la dépendance aux énergies fossiles, cause première de multiples crises, et au gaz en particulier ; aucun emploi ne peut être garanti sans un plan pour l'automobile, et même pour l'industrie dans son ensemble. Le climat est toujours là, inexorablement transversal. Les solutions ne peuvent être que politiques.
Qui doit s’en occuper ?
Élections en vue : quel plan climatique la politique propose-t-elle ?
En théorie, deux grands axes se distinguent. Le fait est que la politique italienne n'a jusqu'à présent jamais eu à prendre position sur le climat ou ne l’a jamais voulu, ce qui n'a pas aidé à y voir clair.
Le premier affirme qu'il faut « y aller doucement, sans quoi la décarbonation sera un bain de sang ». Le seconde affirme qu'il faut « s’activer, car la décarbonation est une opportunité ». Entre les deux, on trouve une infinité de nuances et d’approches : dirigistes, technocrates, libéraux, paternalistes, sceptiques, adeptes de la fusion nucléaire, etc.
Ces positions prendront-elles la forme d'un plan ? Ce plan fournira-t-il une stratégie efficace et convaincante dans la réalité, reposant sur des faits et non sur des fantasmes, détachée des intérêts particuliers et conforme aux objectifs internationaux et scientifiques visant à maintenir la hausse moyenne de la température mondiale sous 1,5 degré ?
Le travail d'ECCO identifie un certain nombre de thèmes transversaux que doit comporter un plan climatique auquel le monde politique ne peut se substituer pour réaliser la transition écologique durablement et pour tou-te-s. Dans les semaines à venir, nous publierons nos contributions à l'appui des questions suivantes :
Énergie et crise russe
- Gaz : de l'urgence à la transition. Quelles stratégies pour gérer la crise issue de l’invasion russe en Ukraine, pour sécuriser les approvisionnements lors de la transition et atteindre les objectifs climatiques ? Le gaz est le principal responsable des émissions de gaz à effet de serre en Italie, avec une contribution d'environ 50 % aux émissions nationales de CO2. Le secteur de l'électricité consomme environ 30 % de la demande en gaz, et son prix depuis septembre 2021 est plus de cinq fois supérieur à la moyenne de ces dernières années. Qu’entend-on par « le gaz est un combustible de transition » ? Quand, en quelles quantités et pour quel secteur ?
- Les économies d’énergie constituent-elles une action collective visant à réduire les coûts et les importations pour se protéger de l'imprévu ou sont-elles une menace pour le PIB et un objectif inatteignable en cela qu’elles porte atteinte à la liberté individuelle ? En cas de crise, faut-il d'abord interrompre l'industrie ou enfiler un pull en plus ?
- Les énergies renouvelables sont-elles une variable d’ajustement ou un pilier de la transition énergétique ? Quels objectifs quantitatifs annuels de développement faut-il définir pour les énergies renouvelables et les technologies qui les rendent possible, telles que le stockage et les réseaux, et comment les atteindre ? Comment surmonter les obstacles dans le processus d'autorisation et la conception des marchés afin d’atteindre les objectifs de développement minimaux pour 2030 et 2035, ou de ne pas les atteindre ?
- Efficacité. Le principe de priorité à l'efficacité énergétique est la pierre angulaire de la politique énergétique et climatique de l’UE. Cependant, dans le débat sur la réduction de la dépendance au gaz russe, le gouvernement sortant n'a jamais quantifié la contribution de l'efficacité. L'Italie met en œuvre depuis des années des politiques d'efficacité pertinentes au niveau mondial, telles que les certificats d’économies d’énergie, l’Ecobonus et le Superbonus. Faut-il les renforcer, les abolir ou les réviser ? Quel instrument pour promouvoir l'efficacité énergétique dans les bâtiments publics ?
- Accompagner les familles à travers la crise du gaz et dans la transition. Le gouvernement Draghi a privilégié une politique d'incitations et de subventions indifférenciées pour les usagers domestiques, indépendamment du revenu ou du niveau de consommation, avec quelques exceptions pour la prime énergie. Les véritables hausses des factures auront lieu dans les mois à venir. Les ménages ont-ils du mal à payer l'énergie parce qu'elle est chère ou parce qu'ils sont pauvres ?
- Les mécanismes d’aide tels que le bonus automobile doivent-ils viser à accompagner les ménages dans la transition ou sont-ils des instruments non sélectifs de stimulation de la demande pour soutenir la consommation ? Comment rendre la transition accessible à tous ?
Industrie et emploi
- La décarbonation est-elle une opportunité de croissance et d'innovation pour attirer de nouveaux investissements et redéfinir les aides d'État et les règles relatives à la dette, ou bien une menace qui détruit les investissements passés et appauvrit davantage notre pays ?
- Comment maintenir notre position dans le secteur manufacturier (deuxième en Europe et septième dans le monde) face aux mutations des processus de production, de la chaîne de valeur et de la demande mondiale en produits induites par la transition ? Une stratégie industrielle est nécessaire, mais laquelle, et avec quels outils pour la concrétiser ? Devons-nous maintenir la production d'acier primaire ? Comment concilier notre excellence industrielle avec les objectifs de décarbonation, par exemple dans le domaine des plastiques et des produits chimiques ?
- Comment soutenir ceux qui risquent de perdre leur emploi et comment rassurer ceux qui en ont ou en cherchent un si la transition est retardée et que notre économie passe à côté d’investissements et d’opportunités ?
- Quelle stratégie pour les PME ? Quels outils pour assurer la compétitivité, gérer les risques, les coûts énergétiques et les impacts climatiques ? Quels instruments d'accès au crédit pour l'innovation sont nécessaires ? Une taxonomie européenne comprenant le gaz et le nucléaire est-elle capable de financer les processus de l'économie verte ou faut-il autre chose pour les PME italiennes ?
- Faut-il parler d'économie circulaire et de recyclage ou plutôt d’incinérateurs ? Quelles solutions privilégier pour l'élimination des déchets ? Les brûler et produire de l'énergie ou les considérer comme une ressource à partir de laquelle fabriquer de nouveaux matériaux et accroître la résilience face à la dépendance aux importations ?
Transports
- Quel système de transport est compatible avec la décarbonation ? Est-ce le même qu'aujourd'hui, où l'Italie compte 676 voitures pour mille habitants contre une moyenne européenne de 560 (567 en France, 580 en Allemagne) ou aurons-nous moins de voitures à l’avenir ? Utiliserons-nous des biocarburants à la place de l’essence ? D'où viendront les biocarburants ? Seront-ils durables ? Utilisera-t-on la voiture électrique ? Comment l'achèterons-nous et où la rechargerons-nous ? D'où importerons-nous les matières premières essentielles pour produire les batteries et les moteurs ? Comment allons-nous les recycler ? Allons-nous laisser les autres pays prendre la tête de l'innovation ou voulons-nous jouer un rôle dans cet avenir qui a déjà commencé ?
- Dans l'équation de la mobilité, quel rôle jouent les transports en commun, la planification urbaine et la capacité de coordination entre l'État et les municipalités ? Le train à grande vitesse est-il suffisant ou avons-nous besoin d'un système de transport intermodal efficace pour les déplacements quotidiens ? Quelles politiques pour le coût des transports publics ? Comment trouver les ressources pour transformer nos villes ? Comment les marchandises seront-elles transportées ? Toujours uniquement par voie routière ?
Finance
- Les banques pour le climat Les agences nationales CPD, SACE et Invitalia ont-elles un rôle à jouer dans la transition ? Devraient-elles adopter une feuille de route pour devenir des banques au service du climat, sur le modèle de la Banque européenne, et comment peuvent-elles y parvenir ? Quels outils pour démultiplier les investissements privés, quel rôle jouer dans la gestion des crises, quelles règles pour ne pas immobiliser davantage de ressources dans des secteurs non compatibles avec la décarbonisation ?
Adaptation au changement climatique
- Le changement climatique est en cours. Le plan national d'adaptation, arrêté en 2017, n'a jamais été adopté. Ce plan est-il utile ? Sur quels principes l'adaptation doit-elle reposer ? Quels secteurs doivent être identifiés comme prioritaires et comment les ressources doivent-elles être réparties entre les investissements pour la résilience et la réparation des dégâts ?
Administration publique
- L'administration publique est un acteur clé de la mise en œuvre des politiques nationales à tous les niveaux. Une administration sans structures adéquates ni objectifs et tâches clairs n'est pas en mesure de gérer une crise aussi complexe que la crise climatique. Quelles propositions à ce sujet, à commencer par la relation État-région dans l'autorisation des sources d'énergie renouvelables ?
- Quelles ressources doivent être attribuées aux ministères de la Transition énergétique, de l’Économie et des Finances, du Développement économique et des Affaires étrangères et de la Coopération internationale pour développer des politiques climatiques efficaces en Italie et dans notre diplomatie ?
- Quels instruments pour garantir que la machine étatique est indépendante des grandes entreprises, qui y ont souvent pris part ?
Droit du climat
- De plus en plus de pays européens, de même que l'Union européenne, se sont dotés d'un acquis juridique pour atteindre les objectifs de neutralité climatique et de transition juste. L'Italie adoptera-t-elle un instrument visant à garantir la cohérence et la continuité des politiques et leur mise en œuvre à tous les niveaux de subsidiarité ? Ou bien faut-il éviter d’alourdir et d’impliquer les institutions ? Le cadre réglementaire prévoira-t-il un examen périodique de l'efficacité des politiques par rapport aux objectifs, ou s'agira-t-il d'un exercice libre ? Un comité scientifique indépendant sera-t-il mis en place pour évaluer et suggérer des politiques efficaces ? Des instruments de participation existeront-ils ou la société sera-t-elle exclue ?
Europe
- Le paquet Fit for 55. Quel soutien l'Italie offrira-t-elle à l’Europe ? Faut-il suivre les indications de la Commission selon laquelle ce paquet représente un ensemble cohérent qui ne peut être modifié qu'en proposant des politiques et mesures alternatives ayant le même effet de réduction des émissions ? Ou faut-il y renoncer, et le cas échéant, à quelles parties ? Dans ce cas, comment garantir la réalisation des objectifs climatiques pour 2030 ? Faut-il les ignorer ? Ou encore proposer des objectifs plus ambitieux, en accord avec la science, pour assurer une meilleure compétitivité européenne et internationale de l’Italie ?
- Dans quelle mesure le plan national de relance et de résilience est-il efficace dans la poursuite des objectifs climatiques ? Dans le contexte de la crise du gaz, faut-il/peut-on en revoir certains chapitres et objectifs ? Le plan national de relance et de résilience est un instrument de dette commune. Est-ce une perspective d’avenir pour l’Europe ? Le plan de relance européen « Next Generation EU », qui finance le plan national de relance et de résilience, est-il un instrument qui doit être maintenu pour financer la transition ? L'Italie veut-elle travailler sur ce point en confrontation avec l’Europe ? Quel degré de souverainisme est possible dans un contexte de dette partagée ?
- Quelles exigences nationales présenter à l'Europe en matière de climat, et comment ? Faut-il essayer d'être proactifs dans l'évolution de la législation climatique en Europe pour la rendre aussi adaptée que possible aux besoins de notre pays, ou essayer de ralentir l'introduction de certaines politiques et de certains objectifs sur lesquels les plus grandes faiblesses de l'Italie sont identifiées ? Quelles sont les implications de chacune de ces options, et quelles sont les contre-mesures permettant de minimiser les effets négatifs pour notre pays ?
- Quelle position l'Italie doit-elle avoir par rapport à la dette publique en Europe, et à quel pacte de stabilité voulons-nous revenir ? Comment le financement de la transition écologique s'inscrit-il dans ce débat ? L'UE estime que 270 milliards d'euros de dépenses publiques par an sont nécessaires à la transition. Pour l'Italie, nous pouvons tabler sur environ 30 à 40 milliards d'euros par an, auxquels il faudra probablement ajouter une composante supplémentaire liée à la gestion des impacts sociaux. Cela rentre-t-il dans la catégorie de la bonne dette autorisée dans le cadre du Pacte de stabilité, pour lequel une confrontation spécifique est nécessaire ? Ou bien faut-il dépasser le pacte de stabilité en vue d'un endettement plus important sans trop de conditions, car cela porte atteinte à la souveraineté des pays ?
Politique extérieure
- Quel rôle jouera le climat dans la définition de la politique étrangère? Y aura-t-il un envoyé spécial de haut niveau pour le climat, comme en Allemagne, aux États-Unis et au Royaume-Uni, ou est-il préférable de garder un profil bas ? Le corps diplomatique et institutionnel sera-t-il doté d'un nouveau personnel pour relever le défi ? Le climat sera-t-il intégré aux politiques de défense et de sécurité, de commerce et de développement, ou laissé à lui-même ?
- La sécurité énergétique restera-t-elle indépendante des objectifs de décarbonation ou sera-t-elle alignée sur les objectifs climatiques ? L'Italie décidera-t-elle de se lier à de nouveaux contrats d'approvisionnement coûteux et à de nouvelles infrastructures fossiles, ou reverra-t-elle sa stratégie pour devenir plus autonome et moins influençable ?
- En ce qui concerne la Méditerranée et l'Afrique, l'Italie tentera-t-elle de construire des partenariats favorisant la transition du gaz et du pétrole vers les énergies renouvelables et les matériaux critiques, ou poursuivra-t-elle des politiques d'extraction et de dépendance aux énergies fossiles ?
- Quel sera le programme de l'Italie lors de sa présidence du G7 en 2024 ? Quels axes géopolitiques choisira-t-elle au sein du G20 ? L'Italie renoncera-t-elle à coopérer avec la Chine ou cherchera-t-elle un partenariat sans renoncer à ses valeurs et à ses exigences ?
- Quel rôle l'Italie jouera-t-elle dans la coopération internationale et la justice climatique ? Décidera-t-elle de s'engager à assumer sa part équitable du financement du climat ou réduira-t-elle ses dépenses internationales ? S'efforcera-t-elle de réformer l'architecture financière mondiale ou décidera-t-elle de ne pas intervenir pour combler l'écart d'accès au financement entre les pays du Nord et du Sud ?
[1] En 1990, les émissions en Italie étaient de 520 Mt en équivalent CO2 ; en 2020, les émissions ont été réduites à 381 Mt en équivalent CO2. Données ISPRA (2022) « Italian Greenhouse Gas Inventory 1990 – 2020 ». Les contributions de l’utilisation des terres, du changement d’affectation des terres et de la foresterie sont exclues.